Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Une asexuelle parle

    Voici une  partie d'interview donnée par une asexuelle dans le magazine Flair (magazine feminin belge) cet été. Elle a la trentaine, elle n'est pas différente de vous et pourrait être votre femme, votre soeur, votre amie, votre voisine ou votre collègue.

    L'asexualité est à la mode dans les médias et chacun s'en fait une representation souvent erronée comme l'on peut s'en faire des heterosexuels, des homosexuels ou d'autres minorités. 

    Non l'autre qui est different, c'est vous, c'est moi, c'est un être humain qui vit avec sa et ses differences.

    Pour en savoir plus sur l'asexualité, si vous vous interessez autant au sexe qu'à un après midi de débat à l'assemblée nationale (ou à un match de foot ou au tricot... etc)  ou si vous connaissez autour de vous des personnes qui n'eprouvent pas d'attirance sexuelle d'aucune sorte (qu'elles ont eu ou pas un passé sexuel qui ait pu être satisfaisant ou non) bref qui ne connaissent pas ce "manque" , vous trouverez un lien ci-dessous vous expliquant qui sont les asexuels : des êtres qui ont faim de vie mais pas de sexe.


    http://www.geocities.com/vynthagier/Index.html?200613 

    et  http://www.asexuality.org/fr

    et dans presque toutes les langues (même en japonais !) sur http://www.asexuality.org 

     

     

     

    J’ai découvert Aven (www.asexuality.org/fr), fin 2005 et le terme d’asexualité à la même époque dans deux articles de magazine « Fitness », magazine sportif et « Psychologies » puis me suis inscrite sur le site internet.

     

    Je m’interroge sur l’(a)sexualité depuis toujours

    Enfant, j’avais des amitiés passionnelles avec des petites filles mais suis tombée amoureuse de petits garçons. La sexualité demeurait pour moi quelque chose de mystérieux et incompréhensible.

    Adolescente, je me masturbais mais n’avais pas d’attirance sexuelle ; cela ne me concernait pas et ne m’intéressais pas.

    J’ai perdu ma virginité à l’âge de 19 ans et suis tombée sur un amant merveilleux qui m’a fait découvrir le plaisir et l’orgasme et j’ai eu un gros intérêt soudain pour le sexe.

    Jusqu’à l’âge de 19 ans, j’étais hyper sexuelle avec une activité très fréquente et régulière souvent sous l’emprise de l’alcool, multipliant les amants (plusieurs fois par jour et par semaine), expérimentant mes fantasmes les plus divers mais séparait complètement le sexe de l’amour. Quand j’ai eu deux relations amoureuses, j’ai continué mais me lassait après quelques mois et mes relations s’arrêtaient quand je n’avais plus aucun désir alors que j’aimais encore mes partenaires.

    Après la seconde séparation à l’âge de 25 ans, j’ai eu une longue période de célibat où le sexe ne me manquait pas du tout, au contraire je me sentais plus sereine sans.

    Puis à l’âge de 26 ans je suis tombée amoureuse d’une femme avec qui j’ai vécu pendant un an mais mon désir était vraiment très peu fréquent puis inexistant.

    Durant cette période, un ami qui me voyait passer de relations amoureuses et sexuelles avec des hommes à des femmes me demanda "Mais tu es quoi, hétéro, bi, homo ?" J'eus un tant de pause ne sachant pas quoi dire, ne supportant pas d’être mise dans une case et j'ai répondu spontanément "Je crois que je ne suis pas... sexuelle". Cette vérité que je sortais du plus profond de moi me paraissait aberrante, tant j'avais pratiqué une sexualité active et très régulière avant, mais c'était ce qui me semblait le plus juste.

    La seule fois de ma vie où j’ai eu un désir sexuel intense a été à l’âge de 28 ans lors d’une relation sexuelle  avec une femme que j’aimais secrètement depuis 7 ans ; j’ai vécu l’extase, le septième ciel avec le sentiment que j’allais mourir de plaisir. Cette relation n’a pas pu continuer (distance géographique). Mais en regardant en arrière, je pense que mon asexualité se serait révélé à un moment ou à un autre si j’étais restée avec elle.

    Quelques mois après, je suis tombée amoureuse d’une autre femme, j’ai connu le plaisir mais après les effusions des premiers mois, mon désir s’amenuisait jusqu’à disparaître complètement. Cette vie en commun me convenait, je rêvais d’une relation sororale avec partage et complicité. Cela m’a beaucoup apporté et m’a révélé que depuis toujours je considérais le couple comme une relation fraternelle.

    C’est à chaque fois que j’ai eu des relations sentimentales que j’ai compris que j’étais différente : je ne pouvais me définir comme hétérosexuelle ni homosexuelle ni bisexuelle mais « pas sexuelle » donc asexuelle (j’ai mis du temps à comprendre mais j’étais trop influencée par la norme de société sexuelle).

    Il m’est arrivé ponctuellement d’avoir des aventures pour voir si la machinerie fonctionnait toujours, la société nous ressassant qu’il FAUT avoir une vie sexuelle pour être normale. J’ai eu du plaisir mais je l’ai fait sans aucune attirance… mais je ne ressens plus ce besoin.

    Je me sens bien dans le célibat et suis assez solitaire, privilégiant mes amitiés, mon travail, mes activités.

     

    Je ne pense pas qu’il existe d’identité sexuelle ou asexuelle figée. Toute mon identité est bien plus complexe et inclut ma vie relationnelle, professionnelle, mes intérêts…

    Je tiens à préciser les deux définitions du terme « asexualité » : celle d’Aven (www.asexuality.org/fr) qui la considère comme « une absence d’attirance sexuelle pour les autres », qu’il y ait pratique ou non et l’autre plus large qui inclut l’absence de  relations sexuelles voulues ou non et qui englobe le célibat, les abstinences, la chasteté et la continence.

    Aven regroupe des personnes très différentes, de tous âges, célibataires ou non, certaines n’ont jamais eu de relations sexuelles, d’autres en ont eu et ont arrêté, d’autres en ont (mariés ou en couple) pour contenter l’autre par amour et d’autres vivent en couple des relations sans sexualité (voir le site http://www.asexualites.com/)

    Je ne sais pas si je suis représentative de cette « communauté » ; pour moi l’asexualité est une absence de pratique sexuelle pour diverses raison dont l’une peut être l’absence d’attirance, comme dans mon cas.

    Je peux admirer la beauté d’un homme ou d’une femme comme une œuvre d’art mais sans désir de la « posséder » sexuellement.

    Freud disait que nous sommes tous bisexuels, alors que lui a arrêté toute relation sexuelle à l’âge de 30 ans. Certains hétérosexuels deviennent homosexuels, l’être est changeant.

    L’asexualité peut être temporaire ou permanente selon moi. L’essentiel est d’être soi même, libre et de ne pas s’obliger à ce dont on a pas envie.

    Aujourd’hui si on me disait que je n’aurai plus de relations sexuelles de ma vie, ce serait un soulagement extraordinaire, une corvée de moins.

    Néanmoins si le désir revenait un jour, je l’accueillerais comme j’ai accueilli et assumé mon non-désir. Il faut savoir que l’asexualité n’est pas un dégoût mais une indifférence comme certains n’aiment pas le sport ou le tricot.

     

    J’ai parlé de mon asexualité récemment à ma mère qui l’a comprise et à certains ami(e)s, certains comprennent d’autres la considère comme une « phase » ou un « problème ».

     

    Je ressens une pression sociale généralisée des médias, des magazines féminins (comment plaire)  et de la publicité qui insinuent que la sexualité et la jouissance sont obligatoires au bonheur. Sinon j’ai toujours pensé que la sexualité ou l’asexualité est une affaire privée.

     

    Pour moi l’asexualité a toujours existé, on parlait de « vieux garçons » ou de « vieilles filles ». Dans les couples je pense que ça a été toujours été tabou, avant la contraception, la sexualité se mesurant aux nombres d’enfants…

    On en parle plus aujourd’hui car on ose dire qu’on a envie d’être soi-même, libre, de ne pas être influencée par une société qui nous oblige à être une « bête de sexe ».

     

    Je vis seule et ma vie affective est faite… d’affection, d’amitiés, de partage, d’authenticité et d’envie de rendre les autres heureux.

    Entre l’amitié et l’amour, il y a une différence pour moi, quand on est amoureux on le sait, on le sent, c’est un sentiment passionnel mais aimer sur une longue durée un seul être est plus difficile car l’amour n’est pas un sentiment mais des actes à construire chaque jour.

    J’ai compris que je suis aussi solitaire, que la vie en couple dans une relation exclusive et duelle ne me convient pas car je la trouve enfermante. J’ai envie d’aimer la terre entière mais sans sexualité

     



     

     

  • Jésus bandait-il ?

    Jésus bandait-il ?

     

    Chrétienne catholique, ayant été convertie adulte, je me suis posée la question de l’(a)sexualité de Jésus bien avant le phénomène « Da Vinci Code » de Dan Brown dont je suis restée volontairement éloignée par manque d’intérêt.

     

    Pourquoi l’incarnation de Dieu complètement homme mais sans péché et complètement Dieu, le Tout-Autre, n’aurait-il pas eu d’érection et s’il en a eu qu’en a-t-il fait ?

    Le Christ a connu la condition physique humaine, la faim, la soif, la fatigue, le sommeil mais aussi toutes nos émotions comme la tristesse lors de la mort de son ami Lazare, la colère devant les marchands du Temple ou la révolte sur la Croix donc rien n’indiquerait qu’il n’ait pu éprouver du désir et bander pour une femme (Marie de Magdala ou une autre « pécheresse », telle que la femme adultère ou la Samaritaine) ou même un homme (Saint-Jean le disciple préféré). Jésus avait un attachement  particulier aux femmes, relations sexuées qui en tant que célibataire –état rare à l’époque- dérangeaient les institutions établies et les dirigeants (scribes et pharisiens) tout comme l’ensemble de son message d’amour et de liberté par rapport aux Lois.

    Les quatre Evangiles canoniques, contrairement à ceux apocryphes (ceux de Marie-Madeleine et de Philippe datant du 1er siècle), n’indiquent rien de la sexualité du Christ mais restent également muets sur d’autres aspects humains qu’il a sans doute  expérimenté comme la maladie par exemple, ce qui laisse place à tous les fantasmes possibles.

    Aucun être humain a besoin d’expérimenter toutes les expériences humaines pour se définir en tant qu’être humain. Néanmoins,  pourquoi une expérience aussi banale et commune pour un homme que l’érection et le désir empêcherait-t-elle la divinité du Christ ? L’amour de Dieu, l’agapé, don d’amour absolu et total anéantirait-il l’éros, la pulsion sexuelle que connaît la majorité des êtres humains ?

    En partant sur le postulat que Jésus ait bandé et désiré charnellement qu’a-t-il fait de ce désir ?

    Si on se réfère aux Ecritures et non aux dogmes ultérieurs, un seul verset des Evangiles se referant à la sexualité reste énigmatique (Mathieu 19,12) : « Tous ne comprennent pas ce langage, mais ceux-là à qui c’est donné. Il y a, en effet, des eunuques qui sont nés ainsi du sein de leur mère, il y a des eunuques qui le sont devenus par l’action des hommes, et il y a des eunuques qui se sont rendus tels à cause du Royaume des Cieux. Qui peut comprendre qu’il comprenne ».

    Jésus faisait-il référence nécessairement à un choix de chasteté ? « L’action des hommes » ne pourrait-elle pas représenter non pas une castration physique mais le jugement des hommes par leurs lois « castratrices » empêchant les relations sexuelles pour les célibataires ?

    Jésus ne jugeait pas mais remettait les péchés et il n’a jamais déclaré expressément que les relations sexuelles ou le désir physique étaient des péchés. Le péché de chair est la concupiscence, selon moi, la tendance à se laisser emporter par ses pulsions en considérant les corps comme des uniques objets de plaisir et non aussi le Temple de Dieu, ce qui coupe avec la notion de sacré et donc de Dieu le Père, comme tous les autres péchés.

    Or Jésus qui n’a pas connu le péché, s’il n’a pas répondu à ses pulsions sexuelles humaines et est demeuré vierge l’a fait par choix pour éviter la tentation de l’addiction comme il a repoussé les tentatives du Malin dans le désert concernant d’autres péchés humains passionnels comme l’orgueil ou le pouvoir par exemple. Il a pu non pas éviter ce désir de coït mais le transcender en le transformant en désir de partage et don de soi comme il a transformé l’eau en vin pour contenter les convives aux noces de Cana, ce qui dépasse la notion de sublimation telle qu’elle est conçue en psychanalyse comme mécanisme de défense car s’il est bien un être qui n’a pas usé de « mécanisme de défense » c’est le Christ., il s’en est remis à la volonté de Dieu le Père

    Si le Christ a répondu à son désir en ayant des relations sexuelles, il l’a fait sans se séparer du lien avec son Père et en accomplissant Sa volonté en tant qu’être humain fragile donc par charité (amour du prochain) comme il l’a fait lors des guérisons : pour libérer l’autre et non pour l’asservir ou s’octroyer uniquement un plaisir personnel. Cela n’empêche pas évidemment qu’en tant qu’homme de chair,  Jésus ait connu le plaisir sexuel et l’orgasme sans s’y attacher. Il a pu rester chaste sans être abstinent c’est à dire en gardant le respect des corps considérés comme divins et en restant pur.

     

    En réalité, en tant que chrétienne, le fait que Jésus ait eu ou non une pratique sexuelle m’importe peu. Il n’entache en rien mon amour pour le Christ, ma croyance en sa totale Humanité, Divinité et sa résurrection. Il reste pour moi le modèle unique par son message anti-conformiste d’amour, de tendresse, de générosité envers tous y compris les bannis de la société et de sacrifice pour sauver l’humanité en refusant l’hypocrisie des scribes ou des docteurs de la Loi qui préféraient les apparences à la liberté et à l’amour vrai.

    Les hommes jugent les actes, Lui qui est Amour sauve par la Foi.

    Le christianisme des origines n’a rien contre le sexe (dans le mariage qui semblerait avoir la vertu de protéger de la concupiscence)  et même l’Eglise a condamné les encratites, secte du 2ème siècle qui refusait tout acte sexuel. Plusieurs Pères de l’Eglise tels que Grégoire de Nysse étaient mariés, les autres prônaient l’abstinence avec sévérité, loin de la miséricorde du Christ concernant les « péchés de chair ». C’est Saint-Augustin qui a interprété la genèse comme un 

    péché originel transmissible par l’acte sexuel puis au 6ème siècle le pape Grégoire le Grand qui affirme que le désir sexuel est un péché qui sont à l’origine de la « Loi » de l’Eglise actuelle et non les Evangiles.

    En 1960, Karol Wojtyla, alias le futur Jean Paul II publiait un ouvrage Amour et Responsabilité qui en se basant sur la Genèse (l’homme et la femme étant façonnés à l’image de Dieu, leurs organes sexuels portent également l’empreinte du divin) réhabilitait le plaisir et non plus seulement l’acte sexuel en vue de la procréation. En ce sens, le corps a pour vocation de révéler le mystère de Dieu puisque la communion charnelle figure la communion du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

    Pour conclure je rejoins l’Abbé Pierre qui dans son ouvrage Mon Dieu pourquoi ?  (Plon, 2005, page 52) s’interrogeait également sur une possible relation charnelle entre Jésus et Marie-Madeleine : « Autrement dit, je m’élève contre ceux qui affirment qu’il est impossible que Jésus ait eu des relations sexuelles au nom de sa divinité. Mais je m’élève tout autant contre ceux qui affirment qu’il a nécessairement eu un rapport charnel de par son humanité. Il semble que Dieu incarné peut connaître le plaisir charnel, comme en éprouver le désir, sans y céder. Et dans les deux cas de figure, je crois que cela ne change rien à l’essentiel de la foi chrétienne. ».

     

  • Pélagie, une sainte "transgenre" ?

    SAINTE PÉLAGIE *

     * Tirée des Vies des Pères.

    Pélagie, la première des femmes de la ville d'Antioche, regorgeait de biens et de richesses. Douée d'une beauté extraordinaire, fière et vaine dans sa manière d'être, elle salissait son esprit et son corps dans l’impudicité. Quand il lui arrivait de passer par l’a ville, c'était avec une ostentation telle qu'on ne voyait sur elle qu'or, argent et pierres précieuses; partout où elle allait elle embaumait l’air de l’odeur de toutes sortes de parfums. Elle était précédée. et suivie d'une foule immense de jeunes filles et de jeunes garçons aussi revêtus d'habits somptueux. Un saint père appelé Nonnus, évêque d'Héliopolis, aujourd'hui Damiette, en la voyant, se mit à verser des larmes très amères de ce qu'elle avait plus de souci de plaire au monde qu'il n'en avait lui-même de plaire à Dieu. Se prosternant alors sur le pavé, il frappait la terre avec son visage et l’arrosait de ses larmes, en disant : « Grand Dieu ! pardonnez-moi, misérable pécheur que je suis, parce que cette femme de mauvaises moeurs a mis plus de temps à parer son corps pour un seul jour que je n'en ai mis dans toute ma vie pour me sauver. O Seigneur, que les ornements d'une pécheresse ne soient pas pour moi un sujet de confusion quand je paraîtrai en présence de votre redoutable majesté. Elle est ornée avec les soins les plus exquis pour la terre, et moi qui me suis proposé de vous servir comme mon immortel Seigneur, j'ai été assez négligent pour ne pas accomplir ma, promesse. » Puis il dit à ceux qui se trouvaient là avec lui : « En vérité je vous dis que Dieu ta produira contre nous au jour du jugement, parce qu'elle se farde avec soin pour plaire à des amants sur la terre, tandis que nous négligeons de plaire au céleste époux. » Pendant qu'il disait ces choses et d'autres à peu près semblables, tout à coup il s'endormit, et il vit en songe une colombe noire et puante à l’excès voltiger autour de lui pendant qu'il disait la messe. Quand il eut dit aux catéchumènes de se retirer, la colombe disparut et revint après la messe. Alors l’évêque la plongea dans un vase rempli d'eau et elle en sortit nette et blanche : elle s'envola ensuite si haut, qu'il devint impossible de la voir. Enfin l’évêque s'éveilla. Or, une fois qu'il prêchait à l’église, Pélagie était présente. Elle fut si touchée de ses paroles qu'elle lui écrivit une lettre en ces termes : « Au saint évêque, disciple de J.-C., Pélagie, disciple du diable. Si vous voulez donner une preuve que vous êtes bien le disciple de J.-C. qui, d'après ce que j'ai entendu, est descendu du ciel pour les pécheurs, daignez me recevoir toute pécheresse que je suis, mais repentante. » (170) L'évêque lui répondit: « Je vous prie de ne pas mettre mon humilité à l’épreuve, parce que je suis un :homme pécheur. Si vous désirez être sauvée, vous ne pourrez pas me voir en particulier, mais. vous me verrez avec les autres évêques. »

    Lorsqu'elle fut arrivée auprès de Nonnus placé avec ses collègues, elle se jeta à ses pieds qu'elle tenait de ses mains, et elle dit en 'versant des larmes très amères : « Je suis Pélagie, une mer d'iniquités, agitée par des flots de péchés. Je suis un abîme de perdition, je suis le gouffre et le piège des âmes ; combien se sont laissé duper par moi ! mais j'ai maintenant tous ces crimes en horreur. » Alors l’évêque l’interrogea : « Quel nom avez-vous; lui dit-il ? » Elle répondit : « Dès ma naissance, je  m’appelle Pélagie, mais à cause du luxe de mes vêtements, on  m’appelle Marguerite. » L'évêque, l’accueillant donc avec bonté, lui enjoignit une pénitence salutaire; il l’instruisit avec soin de la crainte de Dieu, et la régénéra par le saint baptême. Or, le diable était là qui criait : « Oh quelle violence. j'endure de ce vieux décrépit ! O violence ! ô vieillesse méchante ! Maudit soit le jour où tu es né pour être mon ennemi, et dans lequel tu n'as ravi ma plus chère espérance ! » Une nuit encore, pendant que Pélagie dormait, le diable vint la réveiller et lui dire : « Dame Marguerite, quel mal t'ai je jamais fait? Ne t'ai-je pas ornée de toutes sortes de richesses et de gloire ? Je t'en prie, dis-moi, en quoi je t'ai contristée, à l’instant je réparerai le tort que je t'ai fait. Seulement, je t'en conjure, ne  m’abandonne pas, afin que je ne devienne pas le sujet du mépris dés chrétiens. » Mais Pélagie se signa et souffla sur le (172) diable qui disparut aussitôt.

    Le troisième jour après son baptême, elle disposa tout ce qui lui appartenait et le donna aux pauvres. Peu de jours après, à l’insu de tout le monde, Pélagie s'enfuit pendant la nuit et vint au mont des Oliviers où, prenant l’habit d'ermite, elle habita une petite cellule dans laquelle elle servit Dieu en pratiquant une rigoureuse abstinence. Elle jouissait d'une réputation extraordinaire, et on l’appelait frère Pélage. Dans la suite, un diacre de l’évêque dont nous avons parlé vint à Jérusalem pour visiter les lieux saints. Or, l’évêque lui avait dit qu'après avoir accompli ses dévotions, il s'informât d'un moine nommé Pelage et qu'il l’allât voir, parce que c'était un vrai serviteur de Dieu. Il le fit, mais bien que Pélagie le reconnût aussitôt, il ne la reconnut cependant point à cause de sa maigreur extrême. Pélagie lui dit: «Avez-vous un évêque? » « Oui, seigneur, répondit-il. » « Qu'il prie pour moi le Seigneur, reprit Pélagie, car c'est un véritable apôtre de J.-C. » Le diacre s'en alla et revint à la cellule de Pélage trois jours après. Mais comme après avoir frappé à la porte personne ne lui avait ouvert, il enfonça la fenêtre, et il vit que Pélage était mort. Il courut annoncer cela à l’évêque qui vint avec le clergé et les moines pour rendre les derniers devoirs à un si saint homme. Mais quand on eut sorti le cadavre de la cellule, on s'aperçut que c'était une femme.

    Tous furent remplis d'admiration, et rendirent grâces à Dieu ; ensuite ils ensevelirent le saint corps avec honneur. Or, elle trépassa le 8ejour d'octobre, vers l’an du Seigneur 290.